Un article publié lundi 23 septembre 2019 sur le site Les Echos annonçait le souhait du gouvernement de faire marche arrière sur l'ACRE, cette exonération partielle et dégressive de cotisations sociales accordée aux auto-entrepreneurs durant leurs 3 premières années d'activité.
La principale raison de ce revirement ? Les différentes mesures mises en place depuis 2018 pour favoriser la création d'entreprise auraient désormais un poids jugé trop important dans le budget de l’État (plus d’un milliard d’euros ?).
Le statut de la micro-entreprise, particulièrement adapté aux nouveaux modes de vie et de travail, aurait en effet connu un engouement inattendu.
Si la suppression de l'ACRE se confirmait, ceci serait évidemment un frein à la création de la micro-entreprise en France. Nous revenons ici sur les raisons de ce volte-face et décryptons les informations disponibles à ce jour.
Création de micro-entreprise : un niveau record atteint en 2018
D'après l'INSEE, près de 308 000 micro-entreprises (ou auto-entreprises) ont été créées en France en 2018.Cela correspondrait à 44 % du total des créations d'entreprises.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette croissance importante :
1. Le doublement des plafonds de chiffre d'affaires
Le 1er janvier 2018, les micro-entrepreneurs ont vu leurs plafonds de chiffre d'affaires doubler, passant ainsi de :
- 33 200 € HT à 70 000 € HT pour la prestation de services et les activités libérales
- 82 800 € HT à 170 000 € HT pour les activités d'achat-revente.
Le doublement des plafonds de chiffre d'affaires n'a toutefois pas entraîné la hausse des seuils permettant de bénéficier de la franchise en base de TVA.
2. L'ouverture de l'ACRE à tous les nouveaux créateurs d'entreprise
Jusqu'à fin 2018, pour bénéficier de l'ACCRE (devenue ACRE en 2019) les créateurs d'entreprise devaient répondre à des conditions spécifiques (être demandeur d'emploi ou avoir moins de 25 ans, etc.)
Mais en 2019, le projet de loi financement pour la sécurité sociale a élargi l'ACRE à toutes les nouvelles créations d'entreprises, sous condition de ne pas en avoir bénéficié durant les 3 dernières années.
L'ACRE étant à l'origine une exonération totale de cotisations sociales, une distinction s'est toutefois opérée entre sociétés et auto-entrepreneurs. Ainsi ceux-ci bénéficient actuellement d'un dispositif spécifique à leur statut :
- une exonération partielle et dégressive des cotisations sociales
- une durée d'exonération de 3 ans
Pour en savoir plus : ACRE (ex-ACCRE) et cotisations sociales : quels changements en 2019 ?
3. La suppression de l'obligation du SPI
Le Stage de Préparation à l'Installation (SPI) est une formation de 4 à 5 jours sur les bases de la gestion d'une entreprise. Ce stage était obligatoire pour toutes les activités qui dépendaient de la Chambre de Métiers de l'Artisanat.
Ce stage, coûtant environ 250 € représentait un frein non négligeable à la création d'entreprise pour les porteurs de projet souhaitant exercer une activité secondaire en micro-entreprise avec des revenus modestes.
La loi PACTE promulguée le 24 mai 2019 a supprimé son caractère obligatoire. Depuis, tous les créateurs d'entreprises peuvent débuter leur activité sans nécessairement réaliser ce stage.
L'ACRE sur 3 ans supprimée dès le 1er octobre 2019 ?
Lundi 23 septembre 2019 : annonce de la réforme de l’ACRE
Le 23 septembre, quelques jours seulement avant la présentation officielle du projet de loi Finances 2020, un article des Échos fait grand bruit chez les auto-entrepreneurs : on y apprend en effet que le gouvernement envisage de réformer l'ACRE en profondeur. Si sa suppression totale n'est pas à l'ordre du jour, la nouvelle version du dispositif a de quoi inquiéter les (futurs) bénéficiaires.
Rappel
L’ACRE est une aide dégressive sur 3 ans, qui permet aux auto-entrepreneurs de bénéficier d’un allègement important des taux de cotisations sociales.
En effet, pour les nouveaux auto-entrepreneurs qui créeraient leur activité à partir d'octobre 2019, la durée de l’aide passerait de 3 ans à 1 an.
Les taux pour cette première période seraient les suivants :
-
6,4 % du CA pour les activités commerciales,
-
11% du CA pour les activités libérales et prestation de services artisanales et commerciales
Pour les auto-entrepreneurs inscrits avant octobre 2019, les taux de cotisations sociales augmenteraient sans délai dès le 1er octobre 2019 :
Type d'activité | Taux de cotisations (avec réforme) | ||
---|---|---|---|
1ère période | 2ème période | 3ème période | |
Achat / revente de marchandises | 3,2 % | 9,6 % | 11,6 % |
Prestation de service commerciale ou artisanale (BIC / BNC) | 5,5 % | 16,5 % | 19,8 % |
Activité libérale | 5,5 % | 16,5 % | 19,8 % |
Une mesure perçue comme une hausse de charges pour tous ceux qui bénéficiaient de l'ACRE.
Pourquoi ce revirement ?
Depuis 2018, le Gouvernement a mis en place de nombreuses mesures pour aider les auto-entrepreneurs à se lancer : doublement des plafonds de chiffre d’affaires, suppression de l’obligation du Stage de Préparation à l’Installation, et surtout ouverture de l’ACRE à tous les nouveaux créateurs d’auto-entreprise.
Or ces changements ont eu plus de succès que prévu puisque le nombre de créations d'auto-entreprises a connu une très forte croissance. Résultat : un manque à gagner d’environ 1,4 milliards d’euros par an que l'État n'avait pas prévu dans son budget. Malgré ses engagements, le Gouvernement a donc souhaité revenir sur les mesures mises en place.
Pour en savoir plus : Vers une suppression de l'exonération ACRE sur 3 ans pour les auto-entrepreneurs ?
La Fédération Nationale des Auto-Entrepreneurs réagit immédiatement
La FNAE (Fédération Nationale des Auto-Entrepreneurs) s’est emparée du sujet le jour même : elle a alors publié un article pour clarifier la situation et lancé une pétition sur la plateforme change.fr.
Elle a également annoncé que la mesure pourrait être appliquée dès le 1er octobre, affectant à la fois les futurs créateurs d’entreprises, mais aussi ceux qui bénéficiaient déjà de l’ACRE.
Après avoir récolté plus de 21 000 signatures, la pétition a été adressée au Premier Ministre Édouard Philippe, .
Lundi 30 septembre 2019 : annonce du gel du décret
La Fédération Nationale des Auto-Entrepreneurs et l'Union des Auto-Entrepreneurs ont été reçues ce lundi 30 septembre par Muriel Pénicaud, Ministre du Travail.
Ce dialogue entamé avec la Ministre du Travail et la forte mobilisation des auto-entrepreneurs ont été fructueux puisque le gel du décret concernant la réforme de l’ACRE a été annoncé.
Si la situation est encore sujette à évolution, il est donc maintenant certain que les exonérations de l’ACRE ne seront pas modifiées d'ici janvier 2020.
Vendredi 4 octobre 2019 : concertation interministérielle
Attention, gel ne veut pas dire annulation : le décret visant à réduire les exonérations de charges est reporté, et non pas supprimé.
Afin de trouver une solution, une concertation interministérielle aura lieu ce vendredi 4 octobre. Elle réunira Matignon, Bercy, la Sécurité Sociale des Indépendants et les organisations telles que la FNAE.
Le Portail Auto-Entrepreneur vous informera des conclusions de cette rencontre, dès qu’un communiqué sera publié.
Réforme de l'exonération ACRE : quelles sont les autres pistes envisagées ?
D'après les informations recueillies via le communiqué de presse de la FNAE, voici les différentes pistes proposées par la FNAE et l'Union des Auto-Entrepreneurs (UAE) et qui seront envisagées lors d’une commission interministérielle qui tiendra lieu prochainement :
- Les autoentrepreneurs déjà bénéficiaires de l’ACRE seront épargnés de la prochaine réforme
- Un retour en arrière des conditions d’obtention de l’ACRE (demandeurs d’emploi, bénéficiaires du RSA, jeunes de moins de 28 ans etc..)
- Ouverture de l’ACRE sur critères tels que le revenu fiscal de référence
Plus d'infos sur les différentes pistes dans notre article : Gel du décret sur l'ACRE : et après ?
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